Anatoms Sonores I

En 1997, mes expérimentations avec l'impression photographique m'ont conduit vers l'imagerie médicale. J'ai établi un pont entre ces deux techniques et commencé à utiliser le film radiographique comme support principal pour une exploration qui n'a cessé d'évoluer depuis. La première installation, Corps en Suspens, consistait en une série de portraits en pied imprimés à l'échelle 1:1. Avec la série Anatoms, le champ d'action s’est élargi à des paysages et des éléments géologiques, appréhendés comme des organes.

Au début de mes recherches, un ami russe en visite dans mon atelier à Brooklyn, m’a fait part d’un autre détournement du film radiographique, survenu en Union soviétique pendant la guerre froide.

Des enregistrements de musique “non officielle”, gravés sur des radios médicales déjà exposées (récupérées dans les déchets des hôpitaux) circulaient illégalement sous l’appellation bones records, music on ribs tel un acte de résistance culturelle. Ils contenaient de la musique venant de l’Occident, en particulier du rock et du jazz, mais aussi des airs populaires russes, considérés par les autorités comme de la “basse culture”.

L'existence de ces disques/objets m'a inspirée à réaliser ma propre version en remplaçant les radios recyclées par des tirages radiographiques analogiques issus de ma propre production, et la musique “non officielle” par un extrait de la performance sonore Microsillon X, spécialement conçue pour défier le microsillon.

L’édition “Anatoms Sonores” à été pensée pour une exposition: 20 “images”, chacune tirée en 12 exemplaires uniques montrant les différentes variations en fonction des types de films radiographiques, ainsi que des marques et des dates de péremption différentes, allant de 1997 à 2024. 10 disques supplémentaires ont été pressés directement sur des films radiographiques vierges, présentant les différentes couleurs d’émulsion.

II. Performance Microsillon X

Le dispositif de la performance consiste en un rouleau de film radiographique placé entre un masseur électrique et une vis en laiton fixée à la table d'harmonie d'un piano droit. Le film radiographique devient un instrument à part entière, amplifié par les vibrations du masseur électrique et de la caisse de résonance du piano.

Je joue en oscillant mon corps avec force et retenue, dirigeant l'appareil électrique de façon régulière et rotative sur la vis. Les sons répétitifs et circulaires que cette action génère évoluent en toute autonomie lors de l’écoute du disque, quel que soit le type de platine ou l’état des microsillon.